mercredi 24 février 2016

Comment ai-je pu oublier de publier ma chronique de Tant que nous sommes vivants ? Comment ai-je pu ne pas me rendre compte que je n'avais pas partagé mon avis sur ce roman, qui m'a transcendé ? Il est l'un de mes plus gros coups de cœur de 2015. Voici enfin mon avis. 

 
Je ne sais pas par où commencer … Ni même après par quoi continuer … Ce roman est tellement beau, tellement magique, qu’à côté des mots d’Anne-Laure Bondoux, les miens paraissent fades et sans sens. Il est difficile de caractériser ce roman : conte, aventure, voyage initiatique, légende, portrait d’une famille, d’une époque, présentation de l’humanité, cri d’amour à la vie … Finalement, c’est avec un peu de tout ça qu’Anne-Laure Bondoux, armée d’une plume douce et délicate, signe l’un des plus beaux chefs-d’œuvre du catalogue de Gallimard Jeunesse, déjà rempli de pépites.

Dans une époque non datée, qui semble si loin de nous et si proche par certains aspects, existe une ville. Dans cette ville, il y a l’Usine, où travaille Hama, ouvrière de nuit, et où est embauché Bo, forgeron de jour. Au premier regard, lors du changement d’équipe, lorsque leurs mains se frôlent, ils tombent amoureux. Dès lors, heureux, ils goûtent avec bonheur à chaque seconde passée ensemble. Mais un jour, une catastrophe vient frapper la ville, et ils se voient obligés de fuir. Fuir leur vie. Leur quotidien. Leurs souvenirs. Et fuir le bonheur qu’ils ont connus dans la Ville qui a vu naître leur amour. Commence alors un long voyage, à travers le monde et les hommes, à la recherche d’un lieu rêvé.

Véritable conte moderne, Anne-Laure Bondoux nous fait grandir avec son histoire. Elle nous permet d’avancer, d’apprendre. Elle nous apprend à aimer la vie, à profiter de celle-ci, à chérir chaque moment de calme, de paix et de bonheur qu’elle nous offre. Elle nous apprend à ne pas pleurer le changement, à l’accepter, et à voir en lui le bénéfique. Elle nous apprend à initier les changements. Elle nous enseigne l’Amour, le voyage, la différence, l’humain, le rêve. Mais elle fait ça sans nous prendre de haut, transmettant son savoir, son expérience, sans ego ni reproches. Elle nous laisse avancer à notre rythme, progresser calmement dans les méandres d’une histoire qui est bien plus qu’une histoire d’amour, bien plus qu’une leçon. On ressort de son roman grandi, meilleur, lucide, et rêveur.

Avec le voyage de ses personnages, l’auteure dresse un portrait de l’humanité. Dans ce qu’elle a de meilleur, comme dans ce qu’elle a de pire. Elle nous montre la lumière mais aussi l’ombre, dévoile le bonheur sans cacher le malheur, évoque l’amitié, parle de l’amour, de l’entraide, décrit l’union, l’engagement, dépeint l’horreur, crie la destruction, la haine, hurle la colère, la rage, la culpabilité, chuchote l’innocence, la douceur, tonne la violence, expose le courage, la fierté, la liberté, nous fait apercevoir le pouvoir, l’envie, la jalousie, la cupidité, et nous dépose au creux de l’oreille la loyauté et la force d’avancer. Son tableau, sans fausse note, criant de vérité, montre combien l’humain est pluriel, combien chacun est différent. Sans être moralisatrice ou donneuse de leçons, Anne-Laure Bondoux se pose en protectrice de l’humanité, en défenseure de la différence.

Puis, il y a les personnages de ce roman. Attachants, uniques. Il y a Bo, l’étranger, ce grand gaillard au cœur d’or et aux muscles forgés, protecteur et amoureux. Il y a aussi Hama, jeune ouvrière délicate et charmante, sensible et qui n’a jamais connu que la Ville. Chacun d’eux a une histoire, un passé, mais en vous les révélant, je vous révélerai le roman et je ne veux pas vous le gâcher. C’est pourquoi je ne vous parlerai pas de Melkior et de ses prophéties, ni de Titine-Grosses-Pattes qui fut un temps la Tsarine, ni des amis ouvriers de nos deux héros, et encore moins de Tsell ou de Quatre, Douze et Deux. Je veux juste vous parler de la justesse de ces personnages, de leur sympathie. Je veux vous parler de leur passé, unique, de leurs histoires respectives qui sont à la fois belles et tragiques, et de tout ce qu’ils ont à vous donner : rire, légèreté, enseignements, rêves … 

Il me faut aussi évoquer la plume d’Anne-Laure Bondoux. Elle est vraiment unique. D’abord, par la manière dont l’auteure raconte son histoire, sans se poser comme juge de ses personnages, ou maîtresse du fil de leur destin. Elle raconte, voilà tout. Elle narre les évènements, comme en simple spectatrice. Elle raconte, et elle enseigne. Elle nous enseigne l'humain, elle nous montre l'humanité, dans ce qu'elle a de pluriel et de singulier. Puis, il y a ses mots. Doux, simples, et beaux. Son roman ressemble à une dentelle, dont chaque fil aurait été fabriqué, choisi puis tissé avec une méticuleuse attention. Aucun mot ne paraît de trop, ne va de travers, c’est beau, c’est même sublime. Son style, c’est un jeu de mélanges entre la prose et la poésie, entre le sublime et le simple, entre le doux et le sincère. Écrite par un autre, cette histoire serait restée unique. Mais entre les mains d’Anne-Laure Bondoux, elle devient un joyau, un diamant qui rayonne tout autour de lui. C’est tout simplement magique : léger, calme, doux, sincère, et délicieux.

Le lecteur, au milieu de tout ça, se retrouve. Il se voit, se cherche, s’apprivoise. Les mots d’Anne-Laure Bondoux sont de ceux qui apaisent, qui calment les cœurs traversant les tempêtes, qui guident ceux qui se sont perdus. On ne peut qu’apprécier, que savourer chacun des mots. Il règne dans ce roman une atmosphère indescriptible. Même dans le pire, même dans les disputes, dans les obstacles qu’impose la vie aux personnages, ils restent dignes, ils restent simples et surtout, ils gardent cette fragilité. Celle qu’Anne-Laure Bondoux a réussi à capter, à photographier puis à décrire. Cette fragilité humaine. 
 
« Faut-il toujours perdre une part de soi pour que la vie continue ? » 

Avec mes plus plates excuses pour ce retard inacceptable,
Théo

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